Radio-télémétrie : une révolution dans la localisation des nids de frelons à pattes jaunes
Publié le 12/05/2025
Maladies, prédateurs
La radio-télémétrie s’impose comme une technique prometteuse pour localiser les nids de Vespa velutina [3], communément appelé frelon à pattes jaunes. Bien que cette méthode ait déjà démontré un potentiel intéressant, elle nécessite encore des améliorations pour surmonter certaines limites techniques. À l’heure actuelle, elle permet à un opérateur de détecter les nids autour des ruchers soumis à une pression de prédation importante. Toutefois, la procédure reste chronophage, et il existe des défis à relever pour la rendre plus fiable et rapide. L’évolution des balises miniaturisées et légères ouvre la voie à une application plus précoce, dès l’apparition des premiers frelons sur les ruchers.
Depuis sa première détection en France en 2004, le frelon à pattes jaunes s’est progressivement installé dans 11 pays européens. Ce prédateur généraliste attaque une large gamme de proies, notamment l’abeille domestique [1]. Son impact sur les colonies est particulièrement grave, car il prélève les butineuses et surtout il perturbe le butinage, engendrant même une paralysie totale de l’activité des colonies en période de forte présence. Ce comportement de défense inadapté des abeilles peut gravement compromettre la survie des colonies car ces dernières ne quittent plus les ruches et ne rapportent donc plus les ressources alimentaires nécessaires à l’hivernage des colonies [2].
Depuis sa première détection en France en 2004, le frelon à pattes jaunes s’est progressivement installé dans 11 pays européens. Ce prédateur généraliste attaque une large gamme de proies, notamment l’abeille domestique [1]. Son impact sur les colonies est particulièrement grave, car il prélève les butineuses et surtout il perturbe le butinage, engendrant même une paralysie totale de l’activité des colonies en période de forte présence. Ce comportement de défense inadapté des abeilles peut gravement compromettre la survie des colonies car ces dernières ne quittent plus les ruches et ne rapportent donc plus les ressources alimentaires nécessaires à l’hivernage des colonies [2].
Face à cet impact, plusieurs stratégies de lutte ont été mises en place, incluant la destruction des nids, la protection des ruches par des dispositifs tels que des muselières ou des harpes électriques, et le piégeage des fondatrices au printemps et des ouvrières en automne. Cependant, la destruction des nids demeure complexe, car ceux-ci sont souvent dissimulés dans les feuillages des arbres, rendant leur détection difficile. Parmi les solutions à l’étude pour surmonter ce défi, la radio-télémétrie émerge comme l’une des plus prometteuses, aux côtés de la caméra thermique et du radar harmonique. Toutefois, c’est la radio-télémétrie qui se distingue par son niveau de développement suffisamment avancé pour être utilisée par les acteurs de terrain.
Face à cet impact, plusieurs stratégies de lutte ont été mises en place, incluant la destruction des nids, la protection des ruches par des dispositifs tels que des muselières ou des harpes électriques, et le piégeage des fondatrices au printemps et des ouvrières en automne. Cependant, la destruction des nids demeure complexe, car ceux-ci sont souvent dissimulés dans les feuillages des arbres, rendant leur détection difficile. Parmi les solutions à l’étude pour surmonter ce défi, la radio-télémétrie émerge comme l’une des plus prometteuses, aux côtés de la caméra thermique et du radar harmonique. Toutefois, c’est la radio-télémétrie qui se distingue par son niveau de développement suffisamment avancé pour être utilisée par les acteurs de terrain.
La radio-télémétrie : une technologie déjà éprouvée mais encore coûteuse
La radio-télémétrie repose sur un principe simple : suivre un individu équipé d’une balise radio-émettrice, grâce à un récepteur et une antenne directionnelle. Utilisée depuis longtemps pour suivre les déplacements d’animaux comme les mammifères et les oiseaux, cette technique a été récemment adaptée aux insectes grâce à la miniaturisation des balises. L’application de la radio-télémétrie à la localisation des nids du frelon à pattes jaunes a été étudiée pour la première fois par Kennedy et al. (2018) [3].
La radio-télémétrie repose sur un principe simple : suivre un individu équipé d’une balise radio-émettrice, grâce à un récepteur et une antenne directionnelle. Utilisée depuis longtemps pour suivre les déplacements d’animaux comme les mammifères et les oiseaux, cette technique a été récemment adaptée aux insectes grâce à la miniaturisation des balises. L’application de la radio-télémétrie à la localisation des nids du frelon à pattes jaunes a été étudiée pour la première fois par Kennedy et al. (2018) [3].
La méthode consiste à équiper un frelon d’une balise PicoPip Ag337 (Lotek), pesant seulement 0,28 g et coûtant 200 €, dont la portée varie entre 300 m et 800 m, selon les conditions environnementales. L’autonomie de la balise est de 10 jours, mais elle peut être récupérée et réutilisée après désactivation temporaire. Pour capter le signal émis, l’opérateur utilise une antenne Yagi, connectée à un boîtier récepteur, ce qui permet de visualiser et d’écouter le signal. Le coût de ce dispositif est actuellement de 3 200 €.
La méthode consiste à équiper un frelon d’une balise PicoPip Ag337 (Lotek), pesant seulement 0,28 g et coûtant 200 €, dont la portée varie entre 300 m et 800 m, selon les conditions environnementales. L’autonomie de la balise est de 10 jours, mais elle peut être récupérée et réutilisée après désactivation temporaire. Pour capter le signal émis, l’opérateur utilise une antenne Yagi, connectée à un boîtier récepteur, ce qui permet de visualiser et d’écouter le signal. Le coût de ce dispositif est actuellement de 3 200 €.
Suivi des frelons : une opération délicate et chronophage
La capture du frelon est effectuée à l’aide d’un filet entomologique, suivi d’un refroidissement pour engourdir l’insecte. Une fois capturé et endormi, le frelon est maintenu sur une plaque de contention afin de fixer, en toute sécurité, la balise autour du pétiole de l’insecte à l’aide d’un fil de kevlar passé dans un anneau de cuivre présent sur la balise. Avant de procéder à sa libération, son aptitude à voler est vérifiée.
La capture du frelon est effectuée à l’aide d’un filet entomologique, suivi d’un refroidissement pour engourdir l’insecte. Une fois capturé et endormi, le frelon est maintenu sur une plaque de contention afin de fixer, en toute sécurité, la balise autour du pétiole de l’insecte à l’aide d’un fil de kevlar passé dans un anneau de cuivre présent sur la balise. Avant de procéder à sa libération, son aptitude à voler est vérifiée.
Le frelon doit en effet peser au moins 0,37 g pour supporter le poids de la balise, soit un rapport de poids balise/frelon inférieur à 0,8 [1]. Le suivi de l’insecte se fait ensuite en orientant l’antenne réceptrice pour capter le signal et en ajustant la sensibilité du récepteur pour une précision optimale. L’insecte étant susceptible de faire de nombreuses pauses, l’opérateur doit régulièrement scruter les arbres et bosquets à proximité pour rechercher la présence éventuelle d’un nid, et utiliser la triangulation pour ajuster la direction du suivi.
Le frelon doit en effet peser au moins 0,37 g pour supporter le poids de la balise, soit un rapport de poids balise/frelon inférieur à 0,8 [1]. Le suivi de l’insecte se fait ensuite en orientant l’antenne réceptrice pour capter le signal et en ajustant la sensibilité du récepteur pour une précision optimale. L’insecte étant susceptible de faire de nombreuses pauses, l’opérateur doit régulièrement scruter les arbres et bosquets à proximité pour rechercher la présence éventuelle d’un nid, et utiliser la triangulation pour ajuster la direction du suivi.
Toutes ces étapes sont résumées dans un document protocole disponible sur le site de l’ITSAP-Institut de l’abeille au lien suivant : Protocole de radio-télémétrie.
Des défis techniques à surmonter pour optimiser la méthode
Malgré son potentiel, la radio-télémétrie présente des défis, principalement liés à sa complexité et à sa durée. En effet, le marquage et le suivi d’un frelon peuvent durer entre 3 et 5 heures, et la localisation d’un nid peut prendre toute une journée, sans garantie de succès. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces limites :
• Le frelon peut mal supporter le poids de la balise et nécessiter des pauses fréquentes, ou être pris dans des branches ou des ronces. Parfois, il est difficile de trouver un frelon capable de voler, ce qui rend la procédure plus longue.
• Des perturbations dues à l’environnement, comme les forêts denses ou les zones urbaines, peuvent entraîner des pertes de signal ou des interférences.
• Une balise peut se décrocher ou cesser d’émettre pour diverses raisons.
• De rares accidents peuvent entraîner la mort de l’insecte, bien que cela soit peu fréquent.
Malgré son potentiel, la radio-télémétrie présente des défis, principalement liés à sa complexité et à sa durée. En effet, le marquage et le suivi d’un frelon peuvent durer entre 3 et 5 heures, et la localisation d’un nid peut prendre toute une journée, sans garantie de succès. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces limites :
• Le frelon peut mal supporter le poids de la balise et nécessiter des pauses fréquentes, ou être pris dans des branches ou des ronces. Parfois, il est difficile de trouver un frelon capable de voler, ce qui rend la procédure plus longue.
• Des perturbations dues à l’environnement, comme les forêts denses ou les zones urbaines, peuvent entraîner des pertes de signal ou des interférences.
• Une balise peut se décrocher ou cesser d’émettre pour diverses raisons.
• De rares accidents peuvent entraîner la mort de l’insecte, bien que cela soit peu fréquent.
Actuellement, la recherche de nids n’est réellement efficace qu’à partir du pic de prédation, en septembre-octobre, et au moment de l’émergence des frelons reproducteurs, en octobre-novembre. Le frelon doit atteindre un poids minimum pour supporter la balise, ce qui n’est généralement possible qu’à partir de cette période. Ce délai rend la détection des nids trop tardive pour protéger efficacement les ruchers ou couper le cycle de reproduction.
Actuellement, la recherche de nids n’est réellement efficace qu’à partir du pic de prédation, en septembre-octobre, et au moment de l’émergence des frelons reproducteurs, en octobre-novembre. Le frelon doit atteindre un poids minimum pour supporter la balise, ce qui n’est généralement possible qu’à partir de cette période. Ce délai rend la détection des nids trop tardive pour protéger efficacement les ruchers ou couper le cycle de reproduction.
Des pistes de perfectionnement depuis 2023 : miniaturisations et innovations
Depuis 2023, l’ITSAP-Institut de l’abeille et l’INRAe d’Avignon explorent plusieurs axes pour améliorer l’efficacité de la radio-télémétrie. Trois pistes principales sont envisagées :
•Miniaturisation des balises : En réduisant encore le poids des balises, il serait possible de permettre aux frelons de voler plus facilement et de rentrer rapidement à leur nid. De plus, les premières générations de frelons ouvrières, plus légères (0,28 g à 0,35 g), pourraient être équipées dès leur arrivée sur les ruchers avec des balises pesant moins de 0,18 g [3].
Depuis 2023, l’ITSAP-Institut de l’abeille et l’INRAe d’Avignon explorent plusieurs axes pour améliorer l’efficacité de la radio-télémétrie. Trois pistes principales sont envisagées :
•Miniaturisation des balises : En réduisant encore le poids des balises, il serait possible de permettre aux frelons de voler plus facilement et de rentrer rapidement à leur nid. De plus, les premières générations de frelons ouvrières, plus légères (0,28 g à 0,35 g), pourraient être équipées dès leur arrivée sur les ruchers avec des balises pesant moins de 0,18 g [3].
•Optimisation du marquage : L'amélioration des protocoles d’anesthésie et de fixation de la balise permettrait de réduire le temps de marquage et d'augmenter l'efficacité de la procédure.
•Utilisation d’un drone : Le recours à un drone équipé d’une antenne radio-télémétrique permettrait de surmonter les obstacles environnementaux. En plaçant le détecteur au-dessus de la végétation ou de bâtiments, il serait possible de maintenir le signal même dans des zones denses, améliorant ainsi la précision du suivi.
•Optimisation du marquage : L'amélioration des protocoles d’anesthésie et de fixation de la balise permettrait de réduire le temps de marquage et d'augmenter l'efficacité de la procédure.
•Utilisation d’un drone : Le recours à un drone équipé d’une antenne radio-télémétrique permettrait de surmonter les obstacles environnementaux. En plaçant le détecteur au-dessus de la végétation ou de bâtiments, il serait possible de maintenir le signal même dans des zones denses, améliorant ainsi la précision du suivi.
La balise ultra-légère : une percée technologique cruciale
Les travaux menés par l’ITSAP et l’INRAe portent sur l’évaluation d’un prototype de balise ultra-légère, baptisée LOCNEST et développée par la société INTUITE (Toulouse, France). Cette balise, à peine plus lourde qu’une abeille (poids de 0,13 g) et coûtant 63 €, permet d’équiper tous les frelons, quel que soit leur poids.
Les travaux menés par l’ITSAP et l’INRAe portent sur l’évaluation d’un prototype de balise ultra-légère, baptisée LOCNEST et développée par la société INTUITE (Toulouse, France). Cette balise, à peine plus lourde qu’une abeille (poids de 0,13 g) et coûtant 63 €, permet d’équiper tous les frelons, quel que soit leur poids.
Sa portée dépasse 1,2 km, réduisant les pertes de signal en milieu ouvert et améliorant la réception en forêt. Son autonomie de 3 à 4 heures reste cependant une contrainte si le frelon tarde à retourner à son nid.
Sa portée dépasse 1,2 km, réduisant les pertes de signal en milieu ouvert et améliorant la réception en forêt. Son autonomie de 3 à 4 heures reste cependant une contrainte si le frelon tarde à retourner à son nid.
Un protocole de marquage révisé : plus rapide et plus efficace
Des ajustements ont également été apportés au protocole de marquage. L’utilisation du CO2 permet désormais d’endormir le frelon en 10 secondes, contre 10 minutes auparavant, rendant le processus plus rapide.
Des ajustements ont également été apportés au protocole de marquage. L’utilisation du CO2 permet désormais d’endormir le frelon en 10 secondes, contre 10 minutes auparavant, rendant le processus plus rapide.
La fixation de la balise est simplifiée grâce à un seul point de colle, permettant une installation plus rapide et efficace.
La fixation de la balise est simplifiée grâce à un seul point de colle, permettant une installation plus rapide et efficace.
L’avenir : drône et lidar pour une détection plus précise
L’INRAe d’Avignon a également développé un drone équipé d’une antenne de radio-télémétrie, capable de renvoyer les données du signal au pilote via une tablette. Ce système permet de maintenir le signal à une plus grande distance, même en présence d’obstacles.
L’INRAe d’Avignon a également développé un drone équipé d’une antenne de radio-télémétrie, capable de renvoyer les données du signal au pilote via une tablette. Ce système permet de maintenir le signal à une plus grande distance, même en présence d’obstacles.
Des tests réalisés en 2024 ont montré que 50 % des pertes de signal pouvaient être récupérées grâce à l’utilisation du drone. Cependant, des restrictions légales limitent l’utilisation de drones dans des zones urbaines, et le coût du matériel reste un obstacle à son déploiement à grande échelle.
Des tests réalisés en 2024 ont montré que 50 % des pertes de signal pouvaient être récupérées grâce à l’utilisation du drone. Cependant, des restrictions légales limitent l’utilisation de drones dans des zones urbaines, et le coût du matériel reste un obstacle à son déploiement à grande échelle.
Bilan et perspectives

Conclusion : vers une détection plus précoce et précise des nids de frelons
Les travaux menés depuis 2023 ouvrent la voie à des améliorations significatives dans la traque et la détection des nids de frelon à pattes jaunes. Bien que des avancées notables aient été réalisées, il reste encore des défis à relever pour rendre cette technique pleinement opérationnelle.
Les travaux menés depuis 2023 ouvrent la voie à des améliorations significatives dans la traque et la détection des nids de frelon à pattes jaunes. Bien que des avancées notables aient été réalisées, il reste encore des défis à relever pour rendre cette technique pleinement opérationnelle.
L’ajout de la technologie LiDAR, qui permettrait de pénétrer la végétation et d’analyser la canopée, pourrait résoudre une partie des difficultés liées à la localisation des nids dissimulés dans les arbres.
L’ajout de la technologie LiDAR, qui permettrait de pénétrer la végétation et d’analyser la canopée, pourrait résoudre une partie des difficultés liées à la localisation des nids dissimulés dans les arbres.
Bibliographie
[1] Rome, Q., Perrard, A., Muller, F., Fontaine, C., Quilès, A., Zuccon, D., & Villemant, C. « Not Just Honeybees: Predatory Habits of Vespa Velutina (Hymenoptera: Vespidae) in France ». Annales de La Société Entomologique de France (N.S.) 57, no 1, 111 (2021).
[2] Requier, F., Rome, Q., Chiron, G., Decante, D., Marion, S., Menard, M., Muller, F., Villemant, C., & Henry. M., « Predation of the Invasive Asian Hornet Affects Foraging Activity and Survival Probability of Honey Bees in Western Europe ». Journal of Pest Science 92, no 2, 56778 (2019).
[1] Rome, Q., Perrard, A., Muller, F., Fontaine, C., Quilès, A., Zuccon, D., & Villemant, C. « Not Just Honeybees: Predatory Habits of Vespa Velutina (Hymenoptera: Vespidae) in France ». Annales de La Société Entomologique de France (N.S.) 57, no 1, 111 (2021).
[2] Requier, F., Rome, Q., Chiron, G., Decante, D., Marion, S., Menard, M., Muller, F., Villemant, C., & Henry. M., « Predation of the Invasive Asian Hornet Affects Foraging Activity and Survival Probability of Honey Bees in Western Europe ». Journal of Pest Science 92, no 2, 56778 (2019).
[3] Kennedy, P. J., Ford, S. M., Poidatz, J., Thiéry, D., & Osborne, J. L. « Searching for Nests of the Invasive Asian Hornet (Vespa Velutina) Using Radio-Telemetry ». Communications Biology 1, no 1, 88 (2018).
[3] Kennedy, P. J., Ford, S. M., Poidatz, J., Thiéry, D., & Osborne, J. L. « Searching for Nests of the Invasive Asian Hornet (Vespa Velutina) Using Radio-Telemetry ». Communications Biology 1, no 1, 88 (2018).
Auteurs :
Baptiste Aurousseau, stagiaire impliqué dans les travaux en 2024
Sophie Pointeau, cheffe de projet bioagresseur – Frelon à pattes jaunes
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