La destruction des nids de frelon asiatiques

Publié le 30/03/2016

Maladies, prédateurs

Le frelon asiatique (Vespa velutina nigrithorax de Buysson, 1905), détecté en France en 2005, a été classé comme danger sanitaire de deuxième catégorie le 26 décembre 2013.

Consécutivement à ce classement, qui permet a l’autorité administrative de définir des actions de surveillance, de prévention et de lutte, un groupe de travail a été constitué à l’initiative du MAAF et du MEDDE.

Réunissant différents acteurs de la filière apicole et de la lutte contre V. velutina, ce groupe de travail bénéficie de l’expérience acquise à l’occasion des nombreuses initiatives de lutte opérationnelle, développées localement, et des connaissances développées dans le cadre des programmes de recherche.

Sur ces bases, il œuvre à l’élaboration d’un plan de surveillance, prévention et lutte définissant les actions à mettre en œuvre dans des conditions pratiques de terrain. Parmi ces actions figurent la destruction des nids, qui a fait l’objet d’une fiche technique destinée aux personnes ou organismes habilités à procéder à cette destruction.

Objectifs et contexte

La destruction des nids doit être réalisée par une personne qualifiée appliquant la charte prévue à cet effet. Avant toute intervention il est nécessaire de contacter l’Organisme à Vocation Sanitaire du secteur afin qu’il confirme que le nid à détruire appartient bien à l’espèce Vespa velutina.

Cette méthode de lutte repose sur la destruction des nids de V. velutina présents autour des ruchers, à des distances les rendant susceptibles d’y exercer une pression de prédation.

Son objectif est, par la réduction du nombre de ces nids, de faire diminuer le nombre d’ouvrières de V. velutina au rucher, et par voie de conséquence la claustration des colonies, afin de maintenir l’activité de butinage.

Les méthodes mises en oeuvre ont peu évolué au cours de ces dernières années. Cependant, l’expérience acquise et l’amélioration des connaissances sur la biologie et le comportement de Vespa velutina nécessitent le respect de certaines préconisations.

Sécurité des personnes

La destruction d’un nid de V. velutina est dangereuse ; un grand nombre de frelons y participent, et manifestent un comportement très agressif. Il est donc important que seules des personnes qualifiées et dument équipées procèdent à cette destruction.

Sécurité de la population

Le risque lié au comportement de la colonie requiert que les personnes (et animaux domestiques) ne participant pas à la destruction du nid soient éloignées à un minimum de 50 m du nid, ou à l’abri dans un local. En cas circulation importante ou d’affluence de personnes, il est nécessaire de baliser un périmètre de sécurité.

Sécurité de l'opérateur

La destruction des nids est une opération dangereuse, en particulier pour l’opérateur procédant à a destruction. Les Equipements de Protection Individuelle (EPI) dont il doit s’équiper peuvent être distingués selon le type de risque encouru.

Protection contre V. velutina

Tout operateur procédant à la destruction d’un nid doit être au minimum équipé d’une combinaison anti frelon. La vitesse de vol de V. velutina et la puissance de l’impact lors de la piqure étant supérieurs à ceux du frelon européen Vespa crabro, il est conseillé de porter en complément des vêtements épais, sous la combinaison.

A cet équipement doivent s’ajouter :

    des lunettes de protection des yeux contre les projections irritantes auxquelles procèdent les ouvrières de V. velutina, des chaussures épaisses et montantes.

    dans le cas où la combinaison n’en est pas équipée, des gants épais et résistants

Manipulation de biocides

La préparation et l’usage de biocide pour la destruction peuvent amener à devoir moduler ou compléter l’équipement de l’opérateur, en fonction des indications d’étiquetage. En particulier, un type de gants (matière, label de conformité) ou de masque de protection contre les inhalations (norme, label de conformité) spécifiques peuvent être requis.

Travaux en hauteur

La situation de certains nids peut amener l’operateur à travailler en hauteur. Dans ce cas, il convient de consulter la règlementation en vigueur. Certaines règles élémentaires liées aux travaux en hauteur doivent également être respectées : La destruction doit impliquer deux opérateurs.

L’autre opérateur doit avoir la capacité, en cas d’accident, à lui porter secours depuis le sol, à savoir le descendre et lui prodiguer les premiers soins d’urgence.

Celui procédant en élévation, à la destruction du nid doit être assuré sur corde, au moyen d’un dispositif adéquat.

Période de destruction des nids

Tenir compte de la saison

La localisation d’un nid peut varier à mesure de son développement. Le nid (embryonnaire) construit par la fondatrice en sortie d’hivernation est généralement situé à des hauteurs faibles et dans des endroits protégés. Il existe à cette période une concurrence entre fondatrices, qui peut entrainer la conquête d’un nid embryonnaire par une autre fondatrice. A l’émergence des premières ouvrières, la colonie (primaire) poursuit son développement sur cette implantation. Si sa localisation ne permet pas son agrandissement, les ouvrières relocalisent la colonie en construisant un nid secondaire, à des plus grandes hauteurs et dans des endroits plus exposés, généralement dans la canopée d’un arbre. La reine va y migrer pour poursuivre sa ponte. A l’automne, l’émergence des premiers males, puis des futures fondatrices, préfigurent la fin de développement du nid.

La destruction précoce des nids présente le double avantage de cibler des nids à la fois de petite taille et plus accessibles, et de détruire les colonies avant qu’elles n’aient exercé de nuisance sur les ruchers. La destruction de nids devra être poursuivie pendant toute la période estivale et automnale, jusqu’au mois de novembre. Au-delà, la majorité des futures fondatrices ayant quitté le nid et les individus restant au nid étant voués à y mourir, cette destruction est inutile.

Tenir compte du créneau horaire

L’activité de V. velutina est exclusivement diurne. La nuit, les individus se regroupent au nid. La destruction des nids au crépuscule ou de nuit permettra d’éliminer la quasi-totalité des individus et de minimiser les risques de délocalisation de la colonie.

Au contraire, la destruction de jour, lorsque certaines ouvrières sont absentes du nid, engendre certains risques. De retour sur le site de destruction, les ouvrières à la recherche de leur nid manifestent un comportement agressif pendant plusieurs jours, constituant un risque pour la population alentour. De plus, le risque de construction de nids nouveaux nids, par la reine ou par ces ouvrières, est majoré. Dans un nid abritant la reine, la colonie pourrait encore produire des mâles et des femelles sexués. Dans le cas contraire, bien que les nids fondés par des ouvrières (femelles non fécondées) ne produisent que des mâles, l’activité de prédation et les nuisances associées se poursuivraient également.

Méthodes de destruction

Précautions d'usage

Identification du nid

Il convient, préalablement à la destruction de tout nid, de s’assurer qu’il s’agit bien d’un nid de V. velutina, en s’appuyant sur la fiche d’identification éditée par le MNHN

Les nids doivent de toute façon être signalés à l’Organisme à Vocation Sanitaire ; celui-ci désigne en tel cas un référent chargé de confirmer l’identification (sur la base d’une photo ou d’un individu capturé à proximité).

Accès au nid

Quel que soit le type de destruction envisagé, l’approche du nid doit se faire le plus discrètement possible, afin de ne pas alerter la colonie ce qui stimulerait le comportement de défense (sortie des ouvrières au comportement agressif). En particulier, l’accès au nid actif ne doit pas engendrer de vibration du support auquel il est fixé (typiquement, un arbre).

La destruction des nids situés en hauteur peut être facilitée par différents moyens (qui peuvent éventuellement être combinés) :

    l’utilisation d’une échelle, qui doit être associée à des EPI permettant d’assurer l’operateur contre une éventuelle chute,

    l’utilisation d’une nacelle (dont la mobilisation augmente le cout d’intervention),

    l’utilisation d’une perche télescopique pour procéder à l’injection d’un biocide (injecteur en haut de la perche, dispositif d’activation de l’injection en bas) puis au décrochage du nid (lame en haut de la perche) opéré à distance.

Lorsque l’accès au nid le permet, il est dans tous les cas préférable d’obstruer la ou les entrées du nid (par exemple au moyen d’une mousse polystyrène) avant de procéder à sa destruction.

Destruction mécanique

Cette méthode de destruction est à privilégier pour les nids facilement accessibles et/ou de petite taille. Elle consiste à obstruer rapidement la ou les entrées du nid, puis à l’envelopper dans un réceptacle (sac, container) suffisamment résistant pour prévenir la perforation des parois par les frelons avant la destruction du nid. Le nid doit alors être rapidement décroché, le réceptacle fermé hermétiquement et détruit par congélation prolongée (minimum de 48h).

Les destructions à l’aide d’arme à feu, lance à eau, flèche ou autre méthode susceptible d’occasionner la dispersion des individus et la délocalisation du nid sont absolument à proscrire.

Destruction chimique

Cette méthode de destruction est requise pour les nids difficilement accessibles et/ou de grande taille. Elle consiste à injecter un biocide homologué (après avoir si possible obstrué le nid) puis, une fois les individus morts, à décrocher le nid traité.

Choix du biocide

Les insecticides utilisables pour la destruction des nids de V. velutina correspondent aux produits biocides du groupe 3 : Produits antiparasitaires- Type de Produit 18 -produits tuant les guêpes et frelons. En fonction des conditions d’intervention, le choix de la spécialité commerciale à injecter doit prendre en compte la forme (poudre, liquide) et les caractéristiques (action de choc, rémanence, toxicité) du biocide.

Dans tous les cas, les conditions d’usages indiquées sur l’étiquetage doivent être respectées. Il est rappelé que le dioxyde de soufre (SO2), fréquemment utilisé pour la destruction des nids, n’appartient pas à la catégorie des biocides autorisés pour cet usage. Il présente en outre un risque élevé pour l’operateur.

Injection du biocide

La partie supérieure du nid, constituée d’un agrégat de fragments d’écorces malaxés avec de la salive, protège le nid des intempéries. C’est dans cette partie, abritant les galettes de couvain et où vie la colonie, que le biocide doit être injecté le biocide.

Pour ce faire, l’injecteur est inséré au travers de l’enveloppe, sous l’agglomérat (approximativement sous le tiers supérieur du nid). La forme du produit (poudre, liquide) et le mode d’injection devront être choisis de manière à favoriser la dispersion du biocide dans l’intégralité du nid.

L’injection d’une quantité excessive de biocide liquide, dans le nid constitué de fragments d’écorces agglomérés, pourrait dans certain cas entrainer un risque de dislocation avant son décrochage. La forme (poudre, liquide) et de la quantité de biocide injectée devront donc être définies en tenant compte de ce risque.

Décrochage du nid

Quel que soit le biocide utilisé, il est indispensable de décrocher le nid dans les 72 h suivant l’injection afin de ne pas exposer le milieu (et notamment les oiseaux qui pourraient, une fois le nid débarrassé de ses gardiennes, venir se nourrir des larves mortes enduites de biocide).

Si l’accès au nid le permet, il sera enveloppé dans un contenant (de la même manière que pour la destruction mécanique), décroché, puis évacué pour destruction. Pour les nids peu accessibles (situés par exemples très en hauteur ou enchevêtrés dans des branchages), le décrochage peut s’effectuer au moyen d’une scie fixée à l’extrémité d’une perche télescopique. La chute du nid et sa probable dislocation entraine un risque de dispersion du biocide dans le milieu. Il est donc nécessaire de disposer des bâches au sol, afin de recueillir les fragments du nid et le biocide qu’il contient.

Documents consultés

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Villemant, C., Muller, F., Haubois, S., Perrard. A., Darrouzzet, E. & Rome, Q. 2011. Bilan des travaux (MNHN et IRBI) sur l’invasion en France de Vespa velutina, le frelon asiatique prédateur d’abeilles. In: Barbançon, J-M. & L’Hostis, M. (eds) Proceedings of the Journée Scientifique Apicole – 11 February 2011, Arles, pp 3-12.

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