Frelon asiatique : évaluation de l’efficacité du piégeage de printemps

Publié le 28/03/2021

Maladies, prédateurs

Le piégeage de printemps consiste en l’installation de dispositifs de piégeage de masse ciblant la capture des reines du frelon à pattes jaunes, Vespa velutina (dit frelon asiatique), pendant la période de fondation des colonies.

En piégeant les reines fondatrices, cette méthode vise à réduire les populations de V. velutina. Elle repose sur l’utilisation de pièges de type « nasse » ou « cloche » dans lesquels sont placés des appâts alimentaires sucrés.

Devant la nécessité d’évaluer rigoureusement l’efficacité du piégeage de printemps, l’ITSAP-Institut de l’abeille a réalisé une étude visant à quantifier son impact réel sur les colonies de V. velutina, et à évaluer sa capacité à réguler les populations et la pression de prédation dans les ruchers.

Cette étude a été conduite sur quatre années (2016 à 2020) et sur une vaste zone, unique moyen de réaliser une évaluation d’impact valable. Ces travaux ont été menés en collaboration et avec l’appui scientifique du Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) et les données ont été analysées par le laboratoire de Biostatistique et Processus Spatiaux (UR 546, BioSP) de l’INRAE d’Avignon.

A l’issue de cette étude les principaux résultats ont été présentés au Comité d’experts apicoles du CNOPSAV (décembre 2020) :

Le piégeage des fondatrices de Vespa velutina au printemps permet de réduire le nombre de nids de frelon asiatique à condition qu’il soit répété durant plusieurs printemps successifs. De premiers résultats montrent qu’avec un piégeage en continu l’effet sur le nombre de nids est renforcé (par exemple, un piégeage répété sans interruption durant 4 années est deux fois plus efficace que lorsqu’il est réalisé seulement sur 3 années). Pour une meilleure efficacité, il est préférable de privilégier un maillage spatial fin et régulier : par exemple sur une surface de 3 km² (cercle de 1 km de rayon autour du rucher à protéger), il faudrait installer 59 pièges répartis avec une distance entre 2 pièges de 350 m. Compte tenu de l’absence de pièges et d’appâts totalement sélectifs et de l’impact du piégeage sur l’entomofaune, il est nécessaire de suivre les précautions d’usage et de limiter la mise en œuvre des actions de piégeage à des territoires où le frelon représente une difficulté pour l’apiculture et menace la survie des colonies. La mise en place, le suivi des pièges et l’évaluation de leur efficacité impliquent une coordination locale rigoureuse.

Une étude basée sur la science collaborative

L’étude a été réalisée dans trois départements : Vendée (85), Morbihan (56) et Pyrénées-Atlantiques (64). L’étude a consisté à réaliser un suivi précis et rigoureux de l’effort de piégeage et des captures ainsi que de l’évolution du nombre de nids et de la pression de prédation. Pour cela, l’ITSAP et le MNHN ont demandé la remontée la plus exhaustive possible des informations suivantes :

    le nombre et la localisation des pièges et des fondatrices piégées au printemps,

    le nombre et la localisation des nids observés tout au long de la saison,

    le niveau de pression de prédation des frelons à pattes jaunes dans les ruchers.

Un important degré de précision quantitative et spatiale a été nécessaire pour étudier les relations spatio-temporelles entre ces variables.

L’étude était basée sur un principe de science collaborative en s’appuyant sur des réseaux de participants bénévoles pour l’acquisition et la transmission des données sur l’ensemble des trois départements et sur plusieurs années.

L’ITSAP s’est appuyé sur des structures partenaires locales chargées de mobiliser et d’organiser les réseaux de participants bénévoles à l’échelle des départements, et de centraliser les données collectées et transmises grâce aux documents fournis par les scientifiques (voir Tableau 1).

Tableau 1 : Structures partenaires à contacter pour participer à l’étude.

Les participants bénévoles étaient principalement des apiculteurs des groupements de défense sanitaire apicole (GDSA) et des entreprises de désinsectisation qui détruisent les nids. Les municipalités ont complété le recensement des pièges et des nids en communiquant auprès des administrés pour identifier des actions de piégeage d’initiative personnelle et de signalements de nids détruits ou non (Tableau 2).

L’ITSAP et le MNHN ont aussi réalisé un inventaire de nids en fin d’année dans les trois départements. Il était destiné à compléter celui fourni par les structures partenaires locales qui englobait essentiellement des signalements de nids détruits sans doute fortement influencés par la fréquentation des lieux et le risque associé à la présence de frelons. Notre démarche visait donc à évaluer et corriger ces biais en réalisant des prospections intensives de nids non détruits dans des zones échantillons au moment où ceux-ci deviennent visibles après la chute des feuilles des arbres.

Tableau 2 : Récapitulatif des principales sources de collecte de données.

Références bibliographiques

[1] Rome Q., Muller F., Théry T., Andrivot J., Haubois S., Rosenstiehl E., Villemant C. 2011. Impact sur l’entomofaune des pièges à bière ou à jus de cirier utilisés dans la lutte contre le frelon asiatique. In: Barbançon, J-M. and L’Hostis, M. (eds) Proceedings of the Journée Scientifique Apicole –11 February 2011, Arles, pp 18-20.

[2] Monceau K., Bonnard O., Thiéry D. 2012. Chasing the queens of the alien predator of honeybee: a water drop in the invasiness ocean. Open Journal of Ecology (2): 183-191.

[3] Note de service DGAL/SDSPA/N2013-8082 du 10 mai 2013 – ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt.

Auteur : 

Sophie Pointeau (ITSAP)

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