Contrôler l’efficacité des traitements anti-varroa : la piste d’un médicament espagnol
Publié le 29/02/2024
Maladies, prédateurs
Face au risque accru de résistance des varroas aux acaricides les plus employés, il faut évaluer l’efficacité des traitements au sein même des ruchers par un traitement dit de « contrôle ». La méthode consiste à dénombrer les varroas résiduels sur un échantillon de ruches juste traitées et estimer ainsi le déparasitage des colonies. Quels sont les médicaments disponibles pour ces contrôles? En France les médicaments à base d’amitraze disposant d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) ne peuvent pas être envisagés pour cet usage. L’ITSAP-Institut de l’abeille a donc testé un médicament vétérinaire espagnol* aux caractéristiques proches de ceux expérimentés par les Groupements de Défense Sanitaire (GDS) ou les ADA en partenariat avec nous.
Depuis l’arrivée de Varroa en France, l’arsenal thérapeutique s’appuie essentiellement sur deux types d’acaricides : les pyréthrenoïdes avec historiquement le Tau-fluvalinate (Apistan®) et plus récemment la fluméthrine (PolyVar yellow®, Bayvarol®) et surtout l’amitraze (Apivar®, et plus récemment Apitraz®). L’Apivar® a été largement préconisé et quasiment sans interruption pendant de nombreuses années car il présentait une efficacité élevée et peu variable. Les médicaments à base de thymol ou d’acides organiques (acide formique et acide oxalique) ont un statut particulier, au regard de leurs conditions d’emploi, contraignantes, et de niveaux d’efficacité plus variables. Ils sont employés de façon complémentaire : un traitement hivernal (à base d’acide oxalique) vient généralement compléter le traitement de fin d’été (au thymol ou à l’acide formique). L’intérêt pour leur emploi a pu connaitre des « effets de mode ».
Depuis l’arrivée de Varroa en France, l’arsenal thérapeutique s’appuie essentiellement sur deux types d’acaricides : les pyréthrenoïdes avec historiquement le Tau-fluvalinate (Apistan®) et plus récemment la fluméthrine (PolyVar yellow®, Bayvarol®) et surtout l’amitraze (Apivar®, et plus récemment Apitraz®). L’Apivar® a été largement préconisé et quasiment sans interruption pendant de nombreuses années car il présentait une efficacité élevée et peu variable. Les médicaments à base de thymol ou d’acides organiques (acide formique et acide oxalique) ont un statut particulier, au regard de leurs conditions d’emploi, contraignantes, et de niveaux d’efficacité plus variables. Ils sont employés de façon complémentaire : un traitement hivernal (à base d’acide oxalique) vient généralement compléter le traitement de fin d’été (au thymol ou à l’acide formique). L’intérêt pour leur emploi a pu connaitre des « effets de mode ».
Alors que des populations de varroas plus ou moins résistantes à l’amitraze ont été décrites récemment dans plusieurs régions de France (Almecija et al., 2020 [1]), se pose la question d’intégrer des médicaments à base de pyréthrinoïdes dans les Plans Sanitaires d’Elevage (PSE) pour alterner les substances employées et freiner la progression de ce phénomène. Cependant l’efficacité des médicaments permettant cette alternance doit être contrôlée car les populations de varroas résistants observées dans le passé restent d’actualité. Des défauts d’efficacité sont encore régulièrement documentés par la FNOSAD lors de ses suivis d’efficacité des médicaments.
Alors que des populations de varroas plus ou moins résistantes à l’amitraze ont été décrites récemment dans plusieurs régions de France (Almecija et al., 2020 [1]), se pose la question d’intégrer des médicaments à base de pyréthrinoïdes dans les Plans Sanitaires d’Elevage (PSE) pour alterner les substances employées et freiner la progression de ce phénomène. Cependant l’efficacité des médicaments permettant cette alternance doit être contrôlée car les populations de varroas résistants observées dans le passé restent d’actualité. Des défauts d’efficacité sont encore régulièrement documentés par la FNOSAD lors de ses suivis d’efficacité des médicaments.
Les critères de choix d’un bon traitement de contrôle
Les essais cliniques de nouveaux médicaments anti-varroa, les suivis d’efficacité ou l’expérimentation de méthodes de lutte requièrent de disposer d’un traitement d’épreuve, aussi appelé traitement de contrôle (TC). Il permet de dénombrer sur un lange les acariens encore présents à l’issue d’une intervention médicamenteuse et de considérer le risque associé au nombre de varroas résiduels ; ou encore d’évaluer le niveau de déparasitage, exprimé en pourcentage d’efficacité, en allongeant la période de monitorage des chutes à celle du traitement testé.
Les essais cliniques de nouveaux médicaments anti-varroa, les suivis d’efficacité ou l’expérimentation de méthodes de lutte requièrent de disposer d’un traitement d’épreuve, aussi appelé traitement de contrôle (TC). Il permet de dénombrer sur un lange les acariens encore présents à l’issue d’une intervention médicamenteuse et de considérer le risque associé au nombre de varroas résiduels ; ou encore d’évaluer le niveau de déparasitage, exprimé en pourcentage d’efficacité, en allongeant la période de monitorage des chutes à celle du traitement testé.
Les caractéristiques attendues d’un traitement de contrôle ont d’abord été définies dans un document-guide établi par le groupe de travail CA3686 (Anonyme, non daté [2] mentionné dans S. Wendling, 2012 [3]) puis plus récemment communiquées dans les lignes-guides de l’European Medicines Agency [4] (EMA) et les Questions et réponses sur les lignes-guide CVMP [5].
Les caractéristiques attendues d’un traitement de contrôle ont d’abord été définies dans un document-guide établi par le groupe de travail CA3686 (Anonyme, non daté [2] mentionné dans S. Wendling, 2012 [3]) puis plus récemment communiquées dans les lignes-guides de l’European Medicines Agency [4] (EMA) et les Questions et réponses sur les lignes-guide CVMP [5].
Principes d’un traitement de contrôle communs aux lignes guides de l’EMA et du CA3686 :
•Traitement basé sur une substance différente de la substance testée ;
•Niveau d’efficacité de 95% minimum ;
•Temps d’observation post traitement réduit pour éviter la ré invasion ;
•Documenter ou tester la sensibilité des varroas à la substance active employée avec le traitement de contrôle.
Principes d’un traitement de contrôle communs aux lignes guides de l’EMA et du CA3686 :
•Traitement basé sur une substance différente de la substance testée ;
•Niveau d’efficacité de 95% minimum ;
•Temps d’observation post traitement réduit pour éviter la ré invasion ;
•Documenter ou tester la sensibilité des varroas à la substance active employée avec le traitement de contrôle.
Principes spécifiques au CA3686 :
•Si le « traitement de contrôle » a un effet « flash » il doit être appliqué en l'absence du couvain operculé (c’est-à-dire exception faite des substances avec une action durable) ;
•Le délai entre la fin du traitement et l’application du traitement de contrôle doit permettre d’inclure la prise en compte des chutes de varroas dues aux effets retardés du traitement, soit jusqu’à deux semaines après la fin du traitement, mais augmente le risque de ré infestation (qui doit être maitrisé en réduisant les possibilités d’infestations entre colonies, que la source soit interne ou externe au rucher concerné) ;
•Enfin le délai de comptage pendant le traitement de contrôle doit prendre en compte les caractéristiques du traitement et se poursuivre jusqu'à ce que la mortalité d'acarien soit négligeable.
Principes spécifiques au CA3686 :
•Si le « traitement de contrôle » a un effet « flash » il doit être appliqué en l'absence du couvain operculé (c’est-à-dire exception faite des substances avec une action durable) ;
•Le délai entre la fin du traitement et l’application du traitement de contrôle doit permettre d’inclure la prise en compte des chutes de varroas dues aux effets retardés du traitement, soit jusqu’à deux semaines après la fin du traitement, mais augmente le risque de ré infestation (qui doit être maitrisé en réduisant les possibilités d’infestations entre colonies, que la source soit interne ou externe au rucher concerné) ;
•Enfin le délai de comptage pendant le traitement de contrôle doit prendre en compte les caractéristiques du traitement et se poursuivre jusqu'à ce que la mortalité d'acarien soit négligeable.
Ajoutons à cela que le traitement de contrôle, s’il a une action durable et peut être employé en présence de couvain, doit malgré tout posséder une cinétique d’efficacité rapide de façon à empêcher la population de varroas de se développer.
Les lignes-guides CA3686 ont été établies à une époque où le nombre de médicaments disposant d’une AMM était très limité et variait selon les pays d’Europe. Une certaine latitude était alors laissée aux opérateurs permettant l’emploi de préparations extemporanées d’amitraze ou d’acide oxalique préparées et appliquées avec un encadrement vétérinaire.
Ajoutons à cela que le traitement de contrôle, s’il a une action durable et peut être employé en présence de couvain, doit malgré tout posséder une cinétique d’efficacité rapide de façon à empêcher la population de varroas de se développer.
Les lignes-guides CA3686 ont été établies à une époque où le nombre de médicaments disposant d’une AMM était très limité et variait selon les pays d’Europe. Une certaine latitude était alors laissée aux opérateurs permettant l’emploi de préparations extemporanées d’amitraze ou d’acide oxalique préparées et appliquées avec un encadrement vétérinaire.
Or depuis 2015, le nombre de médicaments disposant d’une AMM pour la France a été multiplié par trois. Ainsi le rappel réglementaire de 2020 de la Direction Générale de l’alimentation (DGAL) et de l’Anses concernant l’expérimentation de méthodes de lutte contre Varroa précise bien que les expérimentations doivent être réalisées avec l’emploi de médicaments AMM, y compris lorsqu’il s’agit de traitements de contrôle.
Or depuis 2015, le nombre de médicaments disposant d’une AMM pour la France a été multiplié par trois. Ainsi le rappel réglementaire de 2020 de la Direction Générale de l’alimentation (DGAL) et de l’Anses concernant l’expérimentation de méthodes de lutte contre Varroa précise bien que les expérimentations doivent être réalisées avec l’emploi de médicaments AMM, y compris lorsqu’il s’agit de traitements de contrôle.
Existe-t-il un médicament AMM répondant à ces attentes ?
S’il était disponible sur le marché français, un tel médicament serait sans doute directement employé pour le traitement de varroa. Concernant les risques de résistance aux pyréthrenoïdes ou à l’amitraze, peu documentés et encore très variables sur le territoire, il reste possible de doubler le traitement de contrôle avec un médicament utilisant une troisième substance en cas de doute. Mais jusqu’à présent, aucun médicament AMM ne répond à l’ensemble des critères nécessaires, en particulier ceux des durées d’application. La durée d’operculation du couvain d’abeille (3 semaines) est la période pendant laquelle le varroa réalise son cycle de reproduction, à l’abri des acaricides. Les médicaments Apivar® et Apitraz® avec des préconisations d’emploi de 10 semaines, en présence de couvain, ont des durées d’application très longues correspondant à trois cycles de reproduction du parasite. Ainsi en cas d’inefficacité, leur durée d’emploi comme traitement de contrôle permet théoriquement la multiplication des varroas résiduels, ce qui biaise les résultats. Le médicament actuellement disponible en France, applicable sur la période la plus courte – 4 à 6 semaines - est le Bayvarol® (Flumethrine).
S’il était disponible sur le marché français, un tel médicament serait sans doute directement employé pour le traitement de varroa. Concernant les risques de résistance aux pyréthrenoïdes ou à l’amitraze, peu documentés et encore très variables sur le territoire, il reste possible de doubler le traitement de contrôle avec un médicament utilisant une troisième substance en cas de doute. Mais jusqu’à présent, aucun médicament AMM ne répond à l’ensemble des critères nécessaires, en particulier ceux des durées d’application. La durée d’operculation du couvain d’abeille (3 semaines) est la période pendant laquelle le varroa réalise son cycle de reproduction, à l’abri des acaricides. Les médicaments Apivar® et Apitraz® avec des préconisations d’emploi de 10 semaines, en présence de couvain, ont des durées d’application très longues correspondant à trois cycles de reproduction du parasite. Ainsi en cas d’inefficacité, leur durée d’emploi comme traitement de contrôle permet théoriquement la multiplication des varroas résiduels, ce qui biaise les résultats. Le médicament actuellement disponible en France, applicable sur la période la plus courte – 4 à 6 semaines - est le Bayvarol® (Flumethrine).
L’emploi d’acide oxalique reste la meilleure option mais il nécessite l’absence stricte de couvain pour atteindre un niveau d’efficacité satisfaisant. Cela implique une intervention préalable comme le retrait ou le grattage des cadres de couvain lorsqu’ils sont présents en petite quantité ou, dans la plupart des cas, l’encagement de la reine sur 21 à 24 jours. Ce dernier amène les varroas privés de couvain à se disperser pour pouvoir se reproduire. L’application concomitante d’un traitement rémanent permet de faire tomber les varroas au fur et à mesure de la disparition du couvain et ainsi de maitriser la ré-infestation des colonies alentours. Si les chutes de varroas restent importantes, une seconde application d’acide oxalique est envisageable dans les 4 à 5 jours. Dans ce cas, il faut opérer un dégouttement puis une sublimation. Le premier permet de profiter de l’ouverture de la ruche pour libérer la reine. Quant à la seconde, qui ne nécessite pas cette ouverture préalable, elle réduit l’impact d’une application d’acide oxalique sur les abeilles.
L’emploi d’acide oxalique reste la meilleure option mais il nécessite l’absence stricte de couvain pour atteindre un niveau d’efficacité satisfaisant. Cela implique une intervention préalable comme le retrait ou le grattage des cadres de couvain lorsqu’ils sont présents en petite quantité ou, dans la plupart des cas, l’encagement de la reine sur 21 à 24 jours. Ce dernier amène les varroas privés de couvain à se disperser pour pouvoir se reproduire. L’application concomitante d’un traitement rémanent permet de faire tomber les varroas au fur et à mesure de la disparition du couvain et ainsi de maitriser la ré-infestation des colonies alentours. Si les chutes de varroas restent importantes, une seconde application d’acide oxalique est envisageable dans les 4 à 5 jours. Dans ce cas, il faut opérer un dégouttement puis une sublimation. Le premier permet de profiter de l’ouverture de la ruche pour libérer la reine. Quant à la seconde, qui ne nécessite pas cette ouverture préalable, elle réduit l’impact d’une application d’acide oxalique sur les abeilles.
Un médicament espagnol au banc d’essai
Pour évaluer l’efficacité des médicaments à base de pyréthrinoïdes, l’utilisation d’un traitement de contrôle à base d’amitraze reste une option simple et efficace. Le médicament de contrôle ici testé dispose d’une AMM en Espagne. Il se présente sous la forme de bandes de cellulose à imprégner d’une solution huileuse d’amitraze avant emploi. Les bandes sont appliquées une fois (J+1) puis renouvelées après 12 jours et retirées au terme de 5 semaines de traitement (J+35). Ainsi la durée du traitement en présence de couvain est divisée par deux par rapport aux médicaments contenant de l’amitraze disponibles en France. Mais peu de données sont accessibles sur le niveau et la cinétique d’efficacité de ce médicament.
Pour évaluer l’efficacité des médicaments à base de pyréthrinoïdes, l’utilisation d’un traitement de contrôle à base d’amitraze reste une option simple et efficace. Le médicament de contrôle ici testé dispose d’une AMM en Espagne. Il se présente sous la forme de bandes de cellulose à imprégner d’une solution huileuse d’amitraze avant emploi. Les bandes sont appliquées une fois (J+1) puis renouvelées après 12 jours et retirées au terme de 5 semaines de traitement (J+35). Ainsi la durée du traitement en présence de couvain est divisée par deux par rapport aux médicaments contenant de l’amitraze disponibles en France. Mais peu de données sont accessibles sur le niveau et la cinétique d’efficacité de ce médicament.
Dans le cadre de cette évaluation de médicament, nous avons appliqué une série des recommandations définissant un protocole de traitement de contrôle :
•Croisement des substances par l’emploi de Bayvarol® (Fluméthrine) pour contrôler le médicament testé (bandelettes d’amitraze) ;
•Application des lanières de Bayvarol® le jour du retrait des bandelettes d’amitraze : une latence de 11 jours peut être considérée entre le traitement et le traitement de contrôle puisque la première application des bandelettes d’amitraze est remplacée après 12 jours alors que la seconde est retirée après 23 jours ;
•Application de Bayvarol® pendant 4 semaines (durée d’emploi préconisée) ;
•Encagement des reines une semaine après l’application de Bayvarol® pour une durée de trois semaines ;
•Retrait des lanières de Bayvarol®, libération des reines et dégouttement d’une solution d’Api-bioxal® selon les recommandations d’emploi ;
•Suivi des chutes sur lange depuis l’application du Bayvarol® et pendant une semaine après le dégouttement d’Api-bioxal®.
Dans le cadre de cette évaluation de médicament, nous avons appliqué une série des recommandations définissant un protocole de traitement de contrôle :
•Croisement des substances par l’emploi de Bayvarol® (Fluméthrine) pour contrôler le médicament testé (bandelettes d’amitraze) ;
•Application des lanières de Bayvarol® le jour du retrait des bandelettes d’amitraze : une latence de 11 jours peut être considérée entre le traitement et le traitement de contrôle puisque la première application des bandelettes d’amitraze est remplacée après 12 jours alors que la seconde est retirée après 23 jours ;
•Application de Bayvarol® pendant 4 semaines (durée d’emploi préconisée) ;
•Encagement des reines une semaine après l’application de Bayvarol® pour une durée de trois semaines ;
•Retrait des lanières de Bayvarol®, libération des reines et dégouttement d’une solution d’Api-bioxal® selon les recommandations d’emploi ;
•Suivi des chutes sur lange depuis l’application du Bayvarol® et pendant une semaine après le dégouttement d’Api-bioxal®.
Des limites mises au jour
L’efficacité du médicament testé dans notre essai est en moyenne de 92,6 %, avec un intervalle de confiance (IC95) allant de 89,0 % à 96,2 % (n=21). Ce résultat le place en deçà du niveau recommandé par les lignes guides de l’EMA (95 %).
L’efficacité du médicament testé dans notre essai est en moyenne de 92,6 %, avec un intervalle de confiance (IC95) allant de 89,0 % à 96,2 % (n=21). Ce résultat le place en deçà du niveau recommandé par les lignes guides de l’EMA (95 %).
De plus, ruche par ruche, les niveaux d’efficacité obtenus varient de 64,6 à 98,9 % (Tableau 1). Si 16 ruches, soit 76 % de la population du rucher, témoignent d’un niveau d’efficacité du médicament supérieur à 90 %, c’est près d’une ruche sur quatre qui présente des résultats inférieurs (Tableau 2), ce qui est trop faible pour un traitement de contrôle robuste.
De plus, ruche par ruche, les niveaux d’efficacité obtenus varient de 64,6 à 98,9 % (Tableau 1). Si 16 ruches, soit 76 % de la population du rucher, témoignent d’un niveau d’efficacité du médicament supérieur à 90 %, c’est près d’une ruche sur quatre qui présente des résultats inférieurs (Tableau 2), ce qui est trop faible pour un traitement de contrôle robuste.

Tableau 1 : efficacité moyenne (n = 21), intervalle de confiance de la moyenne (IC95) et efficacités minimum et maximum du médicament testé.

Tableau 2 : distribution des efficacités observées pour le médicament testé selon les classes d’efficacité pour les 21 colonies considérées dans notre étude.

Graphique 1 : Légende : MN : mortalité naturelle ; TT1 et TT2 : 2 applications du médicament espagnol (amitraze) ; TC1 : application de Bayvarol® (Fluméthrine) ; TC2 : dégouttement d'Api-bioxal® (acide oxalique)
La cinétique des chutes de varroas sur lange est principalement obtenue lors de la première application des bandelettes (Graphe 1). Les chutes sur langes sont supérieures à la mortalité naturelle (MN) lors des 12 premiers jours de traitement (TT1). Suite au renouvellement des bandes (TT2), les niveaux de chutes ne diffèrent pas des niveaux de mortalité naturelle observés.
La cinétique des chutes de varroas sur lange est principalement obtenue lors de la première application des bandelettes (Graphe 1). Les chutes sur langes sont supérieures à la mortalité naturelle (MN) lors des 12 premiers jours de traitement (TT1). Suite au renouvellement des bandes (TT2), les niveaux de chutes ne diffèrent pas des niveaux de mortalité naturelle observés.
La durée d’application des bandelettes n’est pas limitée à 12 jours : une fois renouvelées, les bandes sont laissées pendant 23 jours selon les préconisations. On pourrait donc envisager un protocole de traitement de contrôle qui consister à encager la reine avec une application unique de bandelettes pendant trois semaines, et une application d’Api-bioxal® en complément lors de la libération de la reine.
La durée d’application des bandelettes n’est pas limitée à 12 jours : une fois renouvelées, les bandes sont laissées pendant 23 jours selon les préconisations. On pourrait donc envisager un protocole de traitement de contrôle qui consister à encager la reine avec une application unique de bandelettes pendant trois semaines, et une application d’Api-bioxal® en complément lors de la libération de la reine.
Cependant la forme pharmaceutique du traitement, à savoir des bandes de cellulose imprégnées d’une solution d’amitraze, induit un comportement de nettoyage par les abeilles. Les fibres de cellulose, résultant du grignotage par les ouvrières, passent au travers du plancher grillagé et se retrouvent sur le lange, parfois en grande quantité. Le dénombrement des varroas nécessite alors de fouiller méticuleusement l’amas de fibres, ce qui complique les observations, augmente le temps passé au comptage et peut fausser le nombre d’individus observés. Ce processus de dégradation peut expliquer le niveau d’efficacité variable d’une ruche à l’autre, mais l’état des bandes n’a pas été observé régulièrement au cours du traitement pour permettre de valider cette explication.
Cependant la forme pharmaceutique du traitement, à savoir des bandes de cellulose imprégnées d’une solution d’amitraze, induit un comportement de nettoyage par les abeilles. Les fibres de cellulose, résultant du grignotage par les ouvrières, passent au travers du plancher grillagé et se retrouvent sur le lange, parfois en grande quantité. Le dénombrement des varroas nécessite alors de fouiller méticuleusement l’amas de fibres, ce qui complique les observations, augmente le temps passé au comptage et peut fausser le nombre d’individus observés. Ce processus de dégradation peut expliquer le niveau d’efficacité variable d’une ruche à l’autre, mais l’état des bandes n’a pas été observé régulièrement au cours du traitement pour permettre de valider cette explication.
L’emploi du médicament espagnol comme seul traitement de contrôle n’est donc pas envisageable du fait d’une efficacité parfois trop basse et en l’absence de connaissances sur la sensibilité des varroas à l’amitraze. Cependant, son emploi dans un protocole de traitement de contrôle plus élaboré peut être envisagé en adaptant ses conditions d’emploi. Il faut toutefois signaler que les fibres de cellulose, dégradées par les abeilles et présentes sur les langes induisent un risque d’erreur de dénombrement des varroas.
L’emploi du médicament espagnol comme seul traitement de contrôle n’est donc pas envisageable du fait d’une efficacité parfois trop basse et en l’absence de connaissances sur la sensibilité des varroas à l’amitraze. Cependant, son emploi dans un protocole de traitement de contrôle plus élaboré peut être envisagé en adaptant ses conditions d’emploi. Il faut toutefois signaler que les fibres de cellulose, dégradées par les abeilles et présentes sur les langes induisent un risque d’erreur de dénombrement des varroas.
Les suivis d’efficacité nécessitent une organisation conséquente
Les préconisations de médicaments dans la lutte contre varroa doivent être actualisées selon les connaissances locales de réussite des traitements. Pour cela, les suivis d’efficacité des médicaments au rucher représentent une approche valide pour identifier de potentiels problèmes mais nécessitent un encadrement, une organisation et un investissement en temps importants. Etablir un protocole de traitement de contrôle qui respecte les critères des lignes-guide est en soi complexe.
Les préconisations de médicaments dans la lutte contre varroa doivent être actualisées selon les connaissances locales de réussite des traitements. Pour cela, les suivis d’efficacité des médicaments au rucher représentent une approche valide pour identifier de potentiels problèmes mais nécessitent un encadrement, une organisation et un investissement en temps importants. Etablir un protocole de traitement de contrôle qui respecte les critères des lignes-guide est en soi complexe.
Il faut en outre intégrer dans cette réflexion ses coûts de mise en œuvre : dans l’expérimentation menée avec le médicament espagnol, la durée d’application des lanières Bayvarol® aurait pu être adaptée à la durée de l’encagement pour rationaliser les déplacements et l’ouverture des ruches. Plus généralement, une évaluation des coût induits par la méthode de suivi (entre les déplacements pour les relevés de langes, le temps des comptages [6] et l’emploi de plusieurs traitements sur les colonies suivies) doit être faite selon le contexte.
Enfin, rappelons que tout défaut d’efficacité peut être déclaré à la pharmacovigilance en suivant les recommandations de l’Anses.
Il faut en outre intégrer dans cette réflexion ses coûts de mise en œuvre : dans l’expérimentation menée avec le médicament espagnol, la durée d’application des lanières Bayvarol® aurait pu être adaptée à la durée de l’encagement pour rationaliser les déplacements et l’ouverture des ruches. Plus généralement, une évaluation des coût induits par la méthode de suivi (entre les déplacements pour les relevés de langes, le temps des comptages [6] et l’emploi de plusieurs traitements sur les colonies suivies) doit être faite selon le contexte.
Enfin, rappelons que tout défaut d’efficacité peut être déclaré à la pharmacovigilance en suivant les recommandations de l’Anses.
Matériel et méthode utilisés pour le test du médicament espagnol
•Cette expérimentation est conduite sur le rucher expérimental de l’ITSAP-Institut de l’abeille (colonies sans production) et encadrée par le Dr vétérinaire S. Hoffmann (Vétérinaire référent en apiculture, conventionné avec l’ITSAP-Institut de l’abeille, membre de la Commission apicole SNGTV). Le rucher est situé à Caumont sur Durance (84) sans autre rucher à proximité directe ou dans un rayon de 500 mètres. Il est composé de 30 colonies logées dans des ruches « Dadant 10 cadres », équipées d’un plancher entièrement grillagé et d’un tiroir à lange.
•L’acquisition du médicament espagnol a fait l’objet d’une « demande d’importation d’un médicament vétérinaire en vue d’utilisation dans un essai clinique ». Il a été appliqué selon les recommandations d’emploi du fabricant : les bandes de cellulose sont préparées avant leur emploi en les imprégnant d’une solution d’amitraze dosée à la seringue. Pour chaque ruche, deux bandes sont insérées dans le nid à couvain puis remplacées après 12 jours (les 20 septembre et 02 octobre 2021 dans notre test). Les bandes sont retirées après cinq semaines d’application, soit le 25 octobre 2021.
•A la suite du traitement testé, le traitement de contrôle consiste à appliquer des lanières de Bayvarol® (Fluméthrine) selon les recommandations d’emploi : quatre lanières par ruche pendant quatre semaines soit entre le 25 octobre et le 22 novembre 2021. Afin de pouvoir doubler le traitement de contrôle un encagement de la reine est réalisé les trois dernières semaines, soit du 01 au 22 novembre, de façon à appliquer un dégouttement d’Api-bioxal® (acide oxalique) en l’absence de couvain après retrait des lanières et libération de la reine.
•Cette expérimentation est conduite sur le rucher expérimental de l’ITSAP-Institut de l’abeille (colonies sans production) et encadrée par le Dr vétérinaire S. Hoffmann (Vétérinaire référent en apiculture, conventionné avec l’ITSAP-Institut de l’abeille, membre de la Commission apicole SNGTV). Le rucher est situé à Caumont sur Durance (84) sans autre rucher à proximité directe ou dans un rayon de 500 mètres. Il est composé de 30 colonies logées dans des ruches « Dadant 10 cadres », équipées d’un plancher entièrement grillagé et d’un tiroir à lange.
•L’acquisition du médicament espagnol a fait l’objet d’une « demande d’importation d’un médicament vétérinaire en vue d’utilisation dans un essai clinique ». Il a été appliqué selon les recommandations d’emploi du fabricant : les bandes de cellulose sont préparées avant leur emploi en les imprégnant d’une solution d’amitraze dosée à la seringue. Pour chaque ruche, deux bandes sont insérées dans le nid à couvain puis remplacées après 12 jours (les 20 septembre et 02 octobre 2021 dans notre test). Les bandes sont retirées après cinq semaines d’application, soit le 25 octobre 2021.
•A la suite du traitement testé, le traitement de contrôle consiste à appliquer des lanières de Bayvarol® (Fluméthrine) selon les recommandations d’emploi : quatre lanières par ruche pendant quatre semaines soit entre le 25 octobre et le 22 novembre 2021. Afin de pouvoir doubler le traitement de contrôle un encagement de la reine est réalisé les trois dernières semaines, soit du 01 au 22 novembre, de façon à appliquer un dégouttement d’Api-bioxal® (acide oxalique) en l’absence de couvain après retrait des lanières et libération de la reine.
•Les chutes de varroas sont dénombrées sur des langes autocollants renouvelés deux fois par semaine entre le 02 septembre et le 29 novembre 2021, soit une période de deux semaines d’observation des chutes naturelles préalablement au traitement testé et jusqu’à une semaine après le dernier traitement de contrôle. Les varroas présents sur un lange sont dénombrés visuellement et de façon exhaustive.
•L’infestation des colonies est estimée par le nombre de varroas total (VT) dénombrés sur langes au cours du traitement testé (TT) et du traitement de contrôle (TC) ; Le nombre de varroas résiduels (VR) est le nombre de varroas dénombrés lors des traitements de contrôle (TC). L’efficacité est calculée selon la formule : (VT-VR) x 100 / VT. L’efficacité moyenne est calculée sur la base des efficacités observées pour chaque ruche encore en vie à la fin de l’expérimentation et avec un intervalle de confiance à 95% [IC95]. Les efficacités obtenues pour la population de ruches de l’expérimentation sont réparties entre les classes : [100,0 > > 95,0 %] = efficacité satisfaisante, [94,9 > > 90,0 %] = bonne efficacité, [89,9 > > 80,0 %] = faible efficacité, [79,9 > > 0,0 %] = défaut d’efficacité.
•La cinétique des chutes est représentée par l’évolution du nombre de varroas sur lange à chaque relevé rapportée au nombre de jour de la période de chutes pris en compte. Au 29 novembre 2021 soit à la fin de l’essai, 9 colonies du rucher expérimental étaient mortes pour différentes raisons. La pression des frelons à pattes jaunes sur le rucher a précipité l’effondrement de colonies déjà fortement impactées par varroa. Ainsi les résultats reposent sur les colonies encore en vie à l’issue de l’essai, soit au terme de 21 répétitions.
•Les chutes de varroas sont dénombrées sur des langes autocollants renouvelés deux fois par semaine entre le 02 septembre et le 29 novembre 2021, soit une période de deux semaines d’observation des chutes naturelles préalablement au traitement testé et jusqu’à une semaine après le dernier traitement de contrôle. Les varroas présents sur un lange sont dénombrés visuellement et de façon exhaustive.
•L’infestation des colonies est estimée par le nombre de varroas total (VT) dénombrés sur langes au cours du traitement testé (TT) et du traitement de contrôle (TC) ; Le nombre de varroas résiduels (VR) est le nombre de varroas dénombrés lors des traitements de contrôle (TC). L’efficacité est calculée selon la formule : (VT-VR) x 100 / VT. L’efficacité moyenne est calculée sur la base des efficacités observées pour chaque ruche encore en vie à la fin de l’expérimentation et avec un intervalle de confiance à 95% [IC95]. Les efficacités obtenues pour la population de ruches de l’expérimentation sont réparties entre les classes : [100,0 > > 95,0 %] = efficacité satisfaisante, [94,9 > > 90,0 %] = bonne efficacité, [89,9 > > 80,0 %] = faible efficacité, [79,9 > > 0,0 %] = défaut d’efficacité.
•La cinétique des chutes est représentée par l’évolution du nombre de varroas sur lange à chaque relevé rapportée au nombre de jour de la période de chutes pris en compte. Au 29 novembre 2021 soit à la fin de l’essai, 9 colonies du rucher expérimental étaient mortes pour différentes raisons. La pression des frelons à pattes jaunes sur le rucher a précipité l’effondrement de colonies déjà fortement impactées par varroa. Ainsi les résultats reposent sur les colonies encore en vie à l’issue de l’essai, soit au terme de 21 répétitions.
Lexique
•NDLR : Seuls les médicaments disposant d’une AMM en France peuvent être préconisés dans le traitement de Varroa après avoir fait l’objet d’une évaluation par les autorités sanitaires françaises. L’objet de cette étude est d’évaluer l’efficacité d’un médicament ayant une AMM en Espagne et présentant des caractéristiques intéressantes pour être utilisé comme traitement de contrôle sous la responsabilité d’un vétérinaire.
[1] Almecija, G. et al. (2020) Inventory of Varroa destructor susceptibility to amitraz and tau-fluvalinate in France’, Experimental and Applied Acarology, 82(1), pp. 1–16. Available at: https://doi.org/10.1007/s10493-020-00535-w.
[2] European working group for the co-ordination of research on integrated Varroa control (1998-1999). Technical guidelines for the evaluation of treatments for control of Varroa mites in honey bee colonies. In: EU Project FAIR CT97-3686, document prepared during discussions within CA3686 working group, 9p.
•NDLR : Seuls les médicaments disposant d’une AMM en France peuvent être préconisés dans le traitement de Varroa après avoir fait l’objet d’une évaluation par les autorités sanitaires françaises. L’objet de cette étude est d’évaluer l’efficacité d’un médicament ayant une AMM en Espagne et présentant des caractéristiques intéressantes pour être utilisé comme traitement de contrôle sous la responsabilité d’un vétérinaire.
[1] Almecija, G. et al. (2020) Inventory of Varroa destructor susceptibility to amitraz and tau-fluvalinate in France’, Experimental and Applied Acarology, 82(1), pp. 1–16. Available at: https://doi.org/10.1007/s10493-020-00535-w.
[2] European working group for the co-ordination of research on integrated Varroa control (1998-1999). Technical guidelines for the evaluation of treatments for control of Varroa mites in honey bee colonies. In: EU Project FAIR CT97-3686, document prepared during discussions within CA3686 working group, 9p.
[3] Wendling, S., 2012. Varroa destructor (ANDERSON ET TRUEMAN, 2000), un acarien ectoparasite de l’abeille domestique Apis mellifera (Linnaeus, 1758). Revue bibliographique et contribution à l’étude de sa reproduction. Thèse pour le doctorat de médecine vétérinaire Faculté de médecine de Créteil. 188 p.
[4] https://www.ema.europa.eu/en/documents/scientific-guideline/guideline-veterinary-medicinal-products-controlling-varroa-destructor-parasitosis-bees-revision-1_en.pdf (consulté en février 2024)
[5] https://www.ema.europa.eu/en/documents/scientific-guideline/questions-answers-cvmp-guideline-guideline-veterinary-medicinal-products-controlling-varroa/cvmp/ewp/77872/2018_en.pdf (consulté en février 2024)
[3] Wendling, S., 2012. Varroa destructor (ANDERSON ET TRUEMAN, 2000), un acarien ectoparasite de l’abeille domestique Apis mellifera (Linnaeus, 1758). Revue bibliographique et contribution à l’étude de sa reproduction. Thèse pour le doctorat de médecine vétérinaire Faculté de médecine de Créteil. 188 p.
[4] https://www.ema.europa.eu/en/documents/scientific-guideline/guideline-veterinary-medicinal-products-controlling-varroa-destructor-parasitosis-bees-revision-1_en.pdf (consulté en février 2024)
[5] https://www.ema.europa.eu/en/documents/scientific-guideline/questions-answers-cvmp-guideline-guideline-veterinary-medicinal-products-controlling-varroa/cvmp/ewp/77872/2018_en.pdf (consulté en février 2024)
Remerciement à Sébastien Hoffmann, vétérinaire, pour la relecture de l’article.
Auteur :
Julien Vallon, référent bioagresseurs / ITSAP-Institut de l’abeille
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